Contrefaçon par fourniture du moyen essentiel de l’invention

A voir les arrêts récents,  la contrefaçon par fourniture de moyens connait un succès certain. L’arrêt du 14 avril 2015 de la Cour de Paris va encore encourager les titulaires de brevets à s’engager sur cette voie, la Cour infirme le jugement qui avait rejeté la contrefaçon.

La solution préconisée par l’invention :

Considérant que l’invention est caractérisée en ce que l’extrémité libre du bras d’essuie-glace présente plusieurs, de préférence deux, pattes qui s’étendent dans la direction longitudinale et qui, dans la position montée, s’engagent dans des logements de pattes prévus sur l’élément d’assemblage afin d’obtenir de manière simple un assemblage par conjugaison de forme de l’extrémité libre du bras d’essuie-glace avec l’élément d’assemblage ; que les pattes sont dans ce cas réalisées d’un seul tenant avec l’extrémité libre du bras d’essuie-glace et s’avancent au moins par zones dans la direction orientée vers la vitre ; que de ce fait les pattes ne sont pas gênantes, ni dans la position non montée ni dans la position montée du balai d’essuie-glace plat ;

Considérant que le brevet se compose de 15 revendications dont seules sont invoquées les revendications 1 à 7, 12 et 15 qui se lisent comme suit :

‘1. Dispositif d’essuie-glace (10), en particulier pour nettoyer les vitres d’un véhicule, comportant un bras d’essuie-glace (14), un balai d’essuie-glace (16), qui est propre à être agencé sur le bras d’essuie-glace (14) et qui comporte des moyens de support (20), qui supportent la lame en caoutchouc (18) et qui peuvent être réalisés de préférence sous la forme d’un rail flexible allongé en forme de bande, et des moyens d’assemblage pour attacher le bras d’essuie-glace (14) à l’extrémité libre (12) du bras d’essuie-glace (14), lesdits moyens d’assemblage comportant un élément de support (22), disposé de manière fixe sur les moyens de support (20), et un élément d’assemblage (24) étant apte à être fixé de manière amovible à l’extrémité libre (12) du bras d’essuie-glace (14), caractérisé en ce que l’extrémité libre (12) du bras d’essuie-glace (14) comporte plusieurs, de préférence deux, pattes (30, 32) qui s’étendent dans la direction longitudinale et qui, dans la position montée, s’engagent dans des logements (34, 36) prévus sur l’élément d’assemblage (24), et en ce que les pattes (30, 32) sont réalisées d’un seul tenant avec l’extrémité libre (12) du bras d’essuie-glace (14) et s’avancent au moins par zones dans la direction orientée vers la vitre.

…….

La contrefaçon :

Considérant qu’en application des dispositions du dernier alinéa de l’article 64 de la convention de Munich, la contrefaçon d’un brevet européen est appréciée conformément à la législation nationale soit, en l’espèce, aux articles L 613-3 à L 613-6 et L 615-1 du code de la propriété intellectuelle ;

Considérant que les premiers juges ont débouté les appelantes de leurs demandes en contrefaçon du brevet européen EP 1 485 280 au motif que les produits commercialisés par la société intimée ne reproduisaient pas l’ensemble des caractéristiques de la revendication 1 et, par voie de conséquence, des revendications dépendantes dans la mesure où elle ne commercialise pas de bras d’essuie-glace compatible avec son connecteur référencé Q-B ;

Considérant que les appelantes soutiennent que le tribunal a ainsi méconnu les dispositions de l’article L 613-4 sur la fourniture de moyens et qui était visé dans leur assignation et que la société intimée a commis des actes de contrefaçon en offrant de livrer sur le territoire français son connecteur Q-B, qui est un élément essentiel du dispositif d’essuie-glace, objet de l’invention brevetée ;

Considérant que l’article L 613-4 du code de la propriété intellectuelle dispose qu »est également interdite, à défaut de consentement du propriétaire du brevet, la livraison ou l’offre de livraison, sur le territoire français, à une personne autre que celles habilitées à exploiter l’invention brevetée, des moyens de mise en oeuvre, sur ce territoire, de cette invention se rapportant à un élément essentiel de celle-ci, lorsque le tiers sait ou lorsque les circonstances rendent évident que ces moyens sont aptes et destinés à cette mise en oeuvre’ ;

Considérant qu’il ressort du procès-verbal de saisie-contrefaçon du 13 octobre 2011 et des photographies n° 12 à 14 prises par l’huissier de justice, que le connecteur référencé Q-B est une pièce intermédiaire présentant une ouverture à l’avant, une patte à l’arrière et deux ailettes élastiques s’étendant vers l’arrière afin de permettre sa fixation au bras d’essuie-glace dont les deux pattes à son extrémité libre s’engagent dans l’ouverture du connecteur par pincement des ailettes ;

Considérant qu’il ressort du comparatif effectué par les sociétés appelantes (pièce n° 25) que le connecteur Q-B reproduit l’élément d’assemblage (24) comportant deux logements (34, 36) dans lesquels s’engagent les pattes situées à l’extrémité libre du bras d’essuie-glace ;

Considérant que l’élément d’assemblage (24) participe au résultat de la revendication principale de l’invention brevetée qui est de proposer un dispositif d’essuie-glace comportant un balai d’essuie-glace (10) s’agençant sur un bras d’essuie-glace (14) dont l’extrémité libre (12) comporte deux pattes (30, 32) s’engageant dans les logements (34, 36) prévus à cet effet sur cet élément d’assemblage ; que cette pièce constitue donc bien un moyen de mise en oeuvre de l’invention brevetée, portant sur un élément essentiel de l’invention ;

Considérant qu’il ressort des pièces versées aux débats, notamment le procès-verbal de saisie-contrefaçon et les catalogues Wiper Blade Qeep et Hybrid Wiper Blade distribués par la société Qeep Auto Spare Parts Limited à l’occasion du salon Equip’Auto 2011, que cette société offre à la livraison sur le territoire français, à des clients non habilités à exploiter l’invention, le connecteur référencé Q-B reproduisant l’élément d’assemblage (24), moyen de mise en oeuvre de l’invention brevetée sous le numéro EP 1 485 280 portant sur l’un des éléments constitutifs de l’invention, ce sans le consentement de la SASU VALEO Systèmes d’Essuyage, titulaire de ce brevet ;

Considérant dès lors que la société Qeep Auto Spare Parts Limited a commis des actes de contrefaçon de la revendication 1 du brevet EP 1 485 280 par fourniture de moyens au sens de l’article L 613-4 susvisé ;

Considérant que la contrefaçon des revendications dépendantes 2 à 7, 12 et 15 de ce brevet réside dans l’application, à l’objet couvert par la revendication principale contrefaite, des moyens couverts par la revendication dépendante ;

Considérant en conséquence que le jugement entrepris sera infirmé en ce qu’il a débouté les appelantes de leurs demandes en contrefaçon des revendications 1 à 7, 12 et 15 du brevet EP 1 485 280 et que statuant à nouveau, il sera jugé qu’en offrant à la livraison sur le territoire français, à des clients non habilités à exploiter l’invention, le connecteur référencé Q-B reproduisant l’élément d’assemblage (24), moyen de mise en oeuvre de l’invention brevetée sous le numéro EP 1 485 280 portant sur l’un des éléments constitutifs de l’invention, ce sans le consentement de la SASU VALEO Systèmes d’Essuyage, titulaire de ce brevet, la société Qeep Auto Spare Parts Limited a commis des actes de contrefaçon des revendications 1 à 7, 12 et 15 de ce brevet par fourniture de moyens ;

Il est à noter que la Cour reprendra dans ce même arrêt le même raisonnement pour un second brevet européen et retenir sa contrefaçon.

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