Face au silence de l’INPI

Du silence de l’INPI,  ce blog en a souvent parlé après la loi du 12 novembre 2013.  L’arrêt du 3 mai de la Cour de cassation relancerait-il le débat ou ne devrait-il s’appliquer qu’au cas particulier de l’affaire ?

Pour que chacun se fasse son opinion, allons tout de suite à cette décision .

Attendu, selon l’arrêt attaqué, que la société ……………., qui avait reçu mandat de la part d’entreprises afin d’intervenir auprès de l’Institut national de la propriété industrielle (l’INPI) pour le paiement des annuités et recevoir toutes notifications relatives au statut des brevets européens, ayant constaté que l’INPI avait décidé de ne plus lui adresser les notifications de déchéance liées au non-paiement des annuités et des redevances complémentaires pour retard de paiement des clients qu’elle représentait, a, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception en date du 16 avril 2015, reçue le 20 avril 2015, demandé au directeur général de l’INPI de lui confirmer qu’elle pouvait continuer d’exercer ses mandats pour le paiement des annuités et la réception de toutes notifications relatives au statut des brevets européens pour lesquels elle s’était constituée ; qu’aucune réponse n’a été apportée par l’INPI à cette demande ; qu’estimant qu’à l’expiration d’un délai de deux mois, le silence de cette administration valait décision implicite de rejet, la société ……………. a, le 23 juillet 2015, formé un recours contre cette décision ; que, par mémoire déposé le 10 décembre 2015, elle a demandé, à titre principal, qu’il soit constaté que le défaut de réponse de la part de l’INPI à sa demande valait acceptation de celle-ci, et, par conséquent, qu’il soit enjoint à l’INPI de la rétablir dans sa capacité de se constituer mandataire, et, à titre subsidiaire, que soit annulée la décision implicite de rejet de sa demande ;

Sur le premier moyen, pris en sa seconde branche :

Vu l’article R. 411-21 du code de la propriété intellectuelle ;

Attendu qu’il résulte de ce texte que l’auteur d’un recours doit, à peine d’irrecevabilité, exposer tous ses moyens, soit dans sa déclaration de recours, soit dans le délai d’un mois suivant cette déclaration ;

Attendu qu’après avoir relevé que, dans son dernier mémoire, la société ……………. demandait, à titre principal, qu’il soit enjoint au directeur général de l’INPI de respecter la décision implicite d’acceptation résultant du défaut de réponse à sa demande, en la rétablissant dans sa capacité de mandataire, l’arrêt se prononce sur cette demande ;

Qu’en statuant ainsi, sans relever d’office l’irrecevabilité de cette demande, alors que le moyen tiré de ce que le défaut de réponse valait décision implicite d’acceptation avait été exposé dans un mémoire déposé plus d’un mois après la déclaration de recours et qu’étant expressément fondé sur l’entrée en vigueur de la loi n° 2013-1005 du 12 novembre 2013, il ne constituait pas une défense aux observations du directeur général de l’INPI, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;

Et sur le moyen relevé d’office en application de l’article 620 du code de procédure civile, après avertissement délivré aux parties :

Vu l’article L. 231-4, 2°, du code des relations entre le public et l’administration ;

Attendu que, selon ce texte, par dérogation à l’article L. 231-1 du même code, le silence gardé par l’administration pendant deux mois vaut décision de rejet lorsque la demande présente le caractère d’une réclamation ;

Attendu que pour juger que le défaut de réponse par le directeur général de l’INPI à la lettre de la société ……………. reçue le 20 avril 2015 valait décision implicite d’acceptation, l’arrêt retient que, si l’article L. 231-5 du code des relations entre le public et l’administration prévoit qu’eu égard à l’objet de certaines décisions ou pour des motifs de bonne administration, l’application de l’article L. 231-1 de ce code peut être écartée par décret en Conseil d’État et en conseil des ministres, les décrets n° 2014-1280 et 2014-1281 du 23 octobre 2014 pris en vertu de ce texte, modifiés par les décrets n° 2015-511 du 7 mai 2015 et 2015-1436 du 6 novembre 2015, ne visent pas les demandes présentées devant le directeur général de l’INPI relatives aux mandataires dans le cadre, notamment, des dispositions de l’article R. 612-2 du code de la propriété intellectuelle ;

Qu’en statuant ainsi, alors que, la société ……………. ayant demandé au directeur général de l’INPI de lui confirmer qu’elle pouvait, comme cet établissement l’avait toujours pratiqué sur la base des articles L. 422-4, R. 612-2, R. 613-43 et R. 618-1 du code de la propriété intellectuelle, « continuer d’exercer ses mandats pour le paiement des annuités et la réception de toutes notifications (…) relatives au statut des brevets européens pour lesquels elle s’est constituée », cette demande présentait le caractère d’une réclamation, de sorte que le défaut de réponse à cette dernière valait décision implicite de rejet, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le …………. 2016 , entre les parties, par la cour d’appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Paris, autrement composée ;

Condamne la société ……………. aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt cassé ;