Brevet de base et CCP : deux indices, l’un non pertinent l’autre éliminatoire.

A propos du principe actif non explicitement mentionné aux revendications du brevet et bien qu’il ait été question d’une terminologie assez souple  «  autres ingrédients thérapeutiques »  associée à l’incise « le cas échéant »,  la Cour  de justice  par son arrêt du 25 juillet 2018 avait déjà apporté des réponses.

52      Au regard de l’ensemble des considérations qui précèdent, un produit est « protégé par un brevet de base en vigueur », au sens de l’article 3, sous a), du règlement no 469/2009, pour autant que ce produit, même s’il n’est pas explicitement mentionné dans les revendications du brevet de base, est nécessairement et spécifiquement visé dans l’une des revendications de ce brevet. À cette fin, ledit produit doit nécessairement relever, pour l’homme du métier, à la lumière de la description et des dessins du brevet de base, de l’invention couverte par ce brevet. L’homme du métier doit être en mesure d’identifier ce produit de façon spécifique à la lumière de l’ensemble des éléments divulgués par ledit brevet, et sur la base de l’état de la technique à la date de dépôt ou de priorité du même brevet.

L’arrêt du 30 avril fournit des indices à propos d’un produit qui répond à la définition fonctionnelle (le  « nécessairement ») , le débat portant sur sa désignation ( le « spécifiquement » )

38      Dans l’affaire au principal, il ressort de la décision de renvoi que, si la sitagliptine n’est pas explicitement mentionnée dans les revendications du brevet de base, elle répond à la définition fonctionnelle employée par l’une des revendications de ce brevet. Dans ces conditions, sous réserve des vérifications qu’il appartient à la juridiction de renvoi d’effectuer, la sitagliptine relève nécessairement, en tant qu’inhibiteur de la DP IV, de l’invention couverte par le brevet de base et, partant, la première condition fixée dans l’arrêt du 25 juillet 2018, Teva UK e.a. (C‑121/17, EU:C:2018:585), est remplie.

39      En revanche, des doutes peuvent être émis sur le point de savoir si la sitagliptine, qui n’est pas identifiée individuellement dans le fascicule du brevet de base en cause au principal, remplit la seconde des deux conditions cumulatives identifiées au point 37 du présent arrêt. Plus précisément, les doutes de la juridiction de renvoi portent, en substance, sur le point de savoir si, en se plaçant à la date de dépôt ou de priorité du brevet de base, et à la lumière de l’ensemble des éléments divulgués par ce brevet, la sitagliptine est spécifiquement identifiable par l’homme du métier alors même qu’elle n’est pas individualisée en tant que mode concret de réalisation dans le fascicule du brevet de base. La juridiction de renvoi cherche ainsi à déterminer quel est le degré de spécificité de la divulgation du produit requis par l’article 3, sous a), du règlement no 469/2009.

1er élément de réponse : un indice non pertinent

41      Il s’ensuit que, même lorsque le produit faisant l’objet du CCP n’est pas individualisé en tant que mode concret de réalisation à tirer de l’enseignement du brevet de base, l’octroi d’un CCP n’est, en principe, pas exclu.

On remarquera  que si son mode concret de réalisation avait été exigé, il y aurait eu de fortes chances que ce principe actif soit mentionné.

2ème élément de réponse : un indice éliminatoire

44      Par sa troisième question, la juridiction de renvoi demande si l’article 3, sous a), du règlement no 469/2009 doit être interprété en ce sens qu’un produit n’est pas protégé par le brevet de base en vigueur, au sens de cette disposition, lorsque, bien que relevant de la définition fonctionnelle contenue dans les revendications de ce brevet, il a été développé après la date de dépôt de la demande du brevet de base, au terme d’une activité inventive autonome.

47      Il s’ensuit qu’un produit faisant l’objet d’un CCP ou d’une demande de CCP qui a été développé, après la date de dépôt ou de priorité du brevet de base, au terme d’une activité inventive autonome, ne saurait être considéré comme relevant de l’objet de la protection conférée par ce brevet.

Ainsi un principe actif non explicitement mentionné aux revendications du brevet est exclu du CCP même s’il remplit la critère de la définition fonctionnelle ( le nécessairement ) quand il a été développé au terme d’une activité autonome ( il n’est donc pas spécifiquement visé dans l’une des revendications).

Mais n’était-ce pas déjà à l’arrêt du 25 juillet 2018, C-121/17

50      En effet, s’il était admis qu’une telle appréciation puisse être effectuée à l’aune de résultats issus de la recherche intervenue après la date de dépôt ou de priorité du brevet de base, un CCP pourrait permettre à son titulaire de bénéficier indûment d’une protection pour ces résultats alors même que ceux-ci n’étaient pas encore connus à la date de priorité ou de dépôt dudit brevet et, de surcroît, en dehors de toute procédure visant à l’obtention d’un nouveau brevet. Ceci contreviendrait, …………, à l’objectif du règlement no 469/2009.

L’arrêt du 30 avril 2020

L’arrêt du 25 juillet 2018