Brevet français, brevet européen, un droit de priorité mais ni avec les mêmes inventeurs ni sur la même invention

Sur la base d’une demande de brevet français, si un brevet européen est demandé, l’article L614-13 évité un cumul de protection.

L’arrêt rendu par la Cour de Paris le 9 mai 2014 écarte la nullité du brevet français invoquée sur la base de l’article L 614-13.

  • Très brièvement les parties et les faits.

Berkem engage une action en contrefaçon contre Partenia sur la base du brevet français. (Cette demande en contrefaçon sera rejetée).  Mais Partenia oppose les dispositions de l’article L614-13 en invoquant le brevet européen dont Berkem a acquis la propriété également auprès de Cecil.

  • La Cour rejette l’application de l’article L614-13 :

Considérant ceci exposé que selon l’article L.614-13 du Code de la propriété intellectuelle,’Dans la mesure où un brevet français couvre une invention pour laquelle un brevet européen a été délivré au même inventeur ou à son ayant cause avec la même date de dépôt ou de priorité, le brevet français cesse de produire ses effets soit à la date à laquelle le délai prévu pour la formation de l’opposition au brevet européen est expiré sans qu’une opposition ait été formée, soit à la date à laquelle la procédure d’opposition est close, le brevet européen ayant été maintenu.’

……

Qu’il résulte de ces éléments, d’une part que les inventeurs du brevet français ne sont pas les mêmes  que les inventeurs du brevet européen, même si la société CECIL était titulaire des deux titres, et d’autre part que le brevet français comporte trois revendications alors que le brevet européen, qui prévoit des dosages, en comporte dix et a donc une portée plus étroite ;

Qu’il y a donc lieu de confirmer le jugement dont appel en ce qu’il a dit que la portée du brevet européen n’était donc pas la même que celle du brevet brevet français et qu’en conséquence il n’y avait pas substitution de ce brevet européen au brevet français ;

Que la fin de non recevoir doit en conséquence être rejetée

  • Ce que la Cour dit de ces deux brevets

Qu’en l’espèce, la société BERKEM fonde son action en contrefaçon sur le brevet FR 94 00179 déposé le 5 janvier 1994 auprès de l’INPI par la société CECIL, délivré le 30 septembre 1998, et dont elle est devenue titulaire ;

Que ce brevet FR 94 00179, ayant comme inventeurs Messieurs MARTINET Pascal, MARCOTTE Guy et HOFMANN Paul, comporte trois revendications qui sont ainsi rédigées:

1. Procédé pour la protection antitermites des constructions, caractérisé en ce qu’il consiste à étendre, préalablement à l’érection de l’édifice, sur la totalité de la surface constructible découverte par les travaux de terrassement, un film de matière plastique qui est imprégné dans la masse d’un composé insecticide.

2. Procédé suivant la revendication 1, caractérisé en ce que le film est constitué par une série de lès chevauchants qui débordent largement au niveau du sol.

3. Procédé suivant l’une ou l’autre des revendications 1 et 2, caractérisé en ce que les brèches nécessaires au passage des canalisations d’alimentation ou d’évacuation sont comblées avec un substrat renfermant des granulés de substance insecticide .

Considérant que ce brevet a servi de base et de priorité à l’invention revendiquée dans le cadre de la procédure internationale et européenne ;

Que le 28 décembre 1994, la société CECIL, revendiquant la priorité du 5 janvier 1994 du brevet FR 94 00179, a en effet déposé une demande PCT ayant pour titre ‘Procédé et matériaux pour la protection anti-termites des constructions’ qui été publiée le 13 juillet 1995 sous le numéro WO 95/18532 en visant pour le brevet européen plusieurs pays et notamment la France ;

Que le 20 août 1998, l’Office européen des brevets a informé la société CECIL de sa décision de Que le 20 août 1998, l’Office européen des brevets a informé la société CECIL de sa décision de délivrer le brevet européen sous le numéro EP 0 738 108, notamment pour la France. Ce brevet européen a été publié le 30 septembre 1998 ;

Qu’à la suite d’une opposition formée par un tiers, le brevet a été maintenu le 28 juillet 2006 sous une forme modifiée ;

Considérant que les revendications du brevet EP 0 738 108 B2 dont les inventeurs désignés sont Messieurs MARTINET Pascal, MARCOTTE Guy et LIEUX Olivier, sont ainsi rédigées :

1. Procédé pour la protection anti-termite des constructions, caractérisé en ce qu’il consiste à étendre, préalablement à l’érection de l’édifice, sur la totalité de la surface constructible découverte par les travaux de terrassement, y compris dans les tranchées des fondations, un film de matière plastique qui est imprégné dans la masse d’un composé insecticide, l’ensemble étant capable de diffuser lentement l’insecticide à une concentration de 0,5% à 2% d’insecticide.

2. Procédé pour la protection anti-termites des constructions, caractérisé en ce qu’il consiste à étendre, préalablement à l’érection de l’édifice, sur la totalité de la surface constructible découverte par les travaux de terrassement, y compris dans les tranchées des fondations, un film de matière plastique qui est imprégné dans la masse d’un composé insecticide, à une concentration de 1% d’insecticide, l’ensemble étant capable de diffuser lentement l’insecticide.

3. Procédé suivant la revendication 1 ou 2 caractérisé en ce que le film est constitué par une série de lès chevauchants qui débordent largement au niveau du sol.

4. Procédé selon l’une quelconque des revendications 1 à 3 caractérisé en ce que la matière plastique est choisie parmi les polyoléfines comme le polyéthylène ou le polypropylène, le chlorure de polyvinyle et (co)polymères analogues.

5. Procédé selon l’une quelconque des revendications 1 à 4 caractérisé en ce que l’insecticide est un termicide choisi parmi les pyrethrinoïdes comme la perméthrine, et les carbamates comme le benfuracarbe, les organohalogénès ou les organophosphorés et analogues.

6. Procédé selon l’une quelconque des revendications 1 à 5 caractérisé en ce que la matière plastique est à base de polyéthylène et l’insecticide est la perméthrine.

7. Procédé selon l’une quelconque des revendications 1 à 6 caractérisé en ce que l’on utilise un film de polyéthylène chargé d’environ 0,5 à 2%, de préférence environ 1% de perméthrine.

8. Procédé selon l’une quelconque des revendications 1 à 7 caractérisé en ce que, de plus, on remblaie le site de la construction par un mélange de substrat de remblai normal ou de granulés ou matières de géométries analogues de matière plastique imprégnée d’insecticide, au niveau des zones où le film est, soit volontairement perforé, soit risque d’être perforé ou interrompu accidentellement.

9. Procédé selon la revendication 8 caractérisé en ce que lesdits granulés ou matières ont la même composition que le film lui-même, et éventuellement proviennent de fragments, déchets ou résidus ou rebuts de sa fabrication.

10. Application des procédés selon l’une quelconque des revendications 1 à 9 aux constructions nouvelles et/ou aux traitements de renouvellement curatifs et/ou préventifs à la protection de zones par barrières verticales profondes.

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