4 modifications du même brevet dont 3 limitations après mise en demeure et avant l’assignation

Le titulaire du brevet peut-il à n’importe quel moment limiter son titre ? Cette question a-t-elle encore un sens après l’arrêt du 12 février 2014 de la Cour de Paris ?

  • La chronologie du brevet

25 juillet 2001 : dépôt de la demande de brevet par Mme D….. , intitulé <Dispositif pour allonger des poignées de sac ou similaire>.

La demande de brevet est limitée modifiée.

11 juin 2004 : délivrance du brevet.

5 mars 2007: Mme D…… adresse une mise en demeure à la société H…. de cesser la commercialiser d’un modèle de sac à main.

11 avril 2007 : constat d’achat par huissier d’un sac argué de contrefaçon du brevet.

11 juin 2007 : la société H ……oppose à Mme D …… différentes antériorités et lui demande de cesser ses réclamations.

Trois limitations du brevet interviennent successivement ( les dates indiquées ci-dessous sont celles des modifications ou des inscriptions de celles-ci et qui sont indiquées à l’arrêt).

–          Le 9 février 2009.

–          Le 20 février 2009.

–          Le 20 octobre 2009.

4 février 2010 : saisie-contrefaçon sur ordonnance présidentielle dans les locaux de la société H ……

1er mars 2010 : assignation de la société H…. à la requête de la Mme D…. et de sa licenciée.

La Cour confirme le jugement qui a annulé le brevet.

  • L’intérêt de l’arrêt porte sur la(les) limitation(s) du brevet qui est (sont) très largement acceptée(s).

Considérant que, de même, la cour estime que les premiers juges, par des motifs pertinents qu’elle approuve, ont exactement retenu que les modifications limitatives du brevet dès lors qu’elles sont inscrites au registre national des brevets sont opposables à la société H….  et que leurs effets rétroagissent à la date du dépôt de la demande de brevet ;

Qu’il sera ajouté que si des modifications sont intervenues après les premières mises en demeure de 2007 et antérieurement à l’introduction de l’action en contrefaçon en 2010 une limitation volontaire pour consolider un brevet français, avant d’agir en contrefaçon (ou à tout moment, même une fois le litige né) est possible en application de la loi de modernisation de l’économie du 4 août 2008 ; que ces dispositions permettent non seulement la modification des revendications mais aussi de la description et des dessins, ainsi qu’il ressort de l’article R 613-45 5°du Code de la propriété intellectuelle (ensuite du décret du 30 décembre 2008) qui énonce que la requête en limitation est accompagnée <<du texte complet des revendications modifiées et, le cas échéant, de la description et des dessins tels que modifiés>> ;

Qu’il ne saurait dès lors être admis, même s’il a été procédé à trois modifications successives en 2009, que celles-ci seraient dilatoires ou frauduleuses, pas plus que celle effectuée antérieurement à la délivrance du brevet, alors qu’un breveté demeure en droit, sans pour autant commettre d’abus, de tenter de consolider son brevet en fonction, notamment, d’antériorités qui lui sont opposées par celui auquel il reproche des actes de contrefaçon avant d’attaquer à ces fins ;

Considérant que, certes, un brevet est nul si après limitations l’étendue de la protection qui lui est conférée a été accrue ; que tel n’est cependant pas le cas en l’espèce, la première modification restreignant la protection à un dispositif où les deux anneaux des poignées sont fixés solidairement à la bandoulière et enserrent de façon amovible les poignées, la 3ème modification, qui remplace la seconde, imposant que le sac porté épaule opère une rotation d’un quart de tour et comporte une distance suffisante pour permettre le passage à l’épaule, tandis que la 4ème modification commande que la bandoulière épouse la forme du sac porté main ;

Que ces modifications limitant la revendication 1 du brevet qui demeurent par ailleurs fondées sur la description (complétée pour les détails de la 1ère modification par les figures) n’étendant pas la protection, ne constituent pas en fait une extension par rapport aux versions antérieures mais précisent l’invention et en réduisent la portée ;

Considérant qu’en conséquence la décision entreprise ne peut qu’être confirmée en ce qu’elle a pris en considération la version définitive du brevet après modification ;