CCP : principe actif ou excipient, principe actif ou dispositif de diagnostic, principe actif ou forme nouvelle d’application ?

Le régime du CCP suscite toujours des interrogations, l’arrêt de la Cour de Paris du 11 septembre 2013 se prononce sur le refus par l’INPI d’un CCP à un dispositif de diagnostic, certes in vivo, au regard de l’existence d’une AMM antérieure à celle invoquée.

20 mai 1994 : dépôt de la demande européenne de brevet n°0712293 «Procédé de préparation de microsphères lipidiques remplies de gaz et microsphères lipidiques remplies de gaz ».

5 mars 2003 : délivrance du brevet européen.

19 mars 2007 : dépôt d’une demande de certificat complémentaire de protection (CCP) par la société BRISTOL MYERS SQIBB devenue depuis LANTHEUS sur la base de la partie française du brevet et se référant à AMM  octroyée dans la Communauté Européenne le 20 septembre 2006 sous le n° EU/1/06/361/001 pour la spécialité pharmaceutique dénommée LUMINITY.

10 avril 2012 : refus de l’INPI, le produit à protéger par la demande de CCP ne peut être que le perflutrène qui bénéficie d’une première AMM obtenue le 18 mai 1998, un médicament dénommé OPTISON.

Autrement dit, un gaz (le perflutren) est utilisé pour le diagnostic médical in vivo. En 1998, le gaz est employé sous la forme de microsphères d’albumine humaine. En 2006, les microsphères sont lipidiques.  Pour obtenir un CCP, la question posée à la Cour est de déterminer quel est le principe actif, le gaz seul (les microsphères ne seraient qu’un excipient ) ou le gaz avec des microsphères dont la modification de la composition changerait le principe actif ?

11 septembre 2013 : la Cour de Paris rejette le recours de LANTHEUS.

Considérant que le principe actif (perflutren) du LUMINITY s’avère effectivement avoir fait l’objet d’une AMM antérieure (de 1998), en tant que médicament dénommé OPTISON  constitué de microsphères d’albumine humaine traitée par la chaleur le contenant, également pour un usage diagnostique uniquement, s’agissant, selon le résumé de ses caractéristiques, d’un «produit de contraste pour échocardiographie traversant le lit capillaire pulmonaire utilisé chez les patients présentant une pathologie cardiovasculaire connue ou suspectée», permettant « I’opacification échographique des cavités cardiaques, l’obtention d’une meilleure définition du relief endocardique ventriculaire gauche, d’où une meilleure visualisation» ;

Qu’il résulte de ces énonciations qu’il s’agissait pour cette spécialité OPTISON déjà d’une application du perflutren en vue d’établir un diagnostic par échocardiographie en améliorant artificiellement le contraste pour mieux visualiser, en particulier les cavités cardiaques, et que le médicament LUMINITY invoqué s’en différencie uniquement par la nature de ses capsules ou coques de microsphères, ces dernières étant remplies aux mêmes fins de perflutren, principe actif en cause, et ce, quand bien même cette différence améliorerait ses performances;

Qu’il sera ajouté que le fait que les microsphères du médicament antérieur ne relèvent pas du brevet de base invoqué à raison de leur nature, albumique et non lipidique, est sans incidence puisqu’en tout état de cause il ne peut être retenu que l’AMM visée par la requérante à l’appui de sa demande de CCP constituerait la première AMM du principe actif perflutren en tant que médicament, d’où il suit que la condition prévue par l’article 3 d) du règlement CE applicable n’est pas satisfaite, justifiant le rejet de la demande de CCP sont s’agit;