Le secret auquel est soumis le conseil en propriété industrielle, s’applique-t-il aussi au destinataire de sa lettre ?

A l’occasion d’un litige post-contractuel, un échange de correspondances intervient entre un avocat d’une partie ( C….. ) et le conseil en propriété industrielle de l’autre partie ( P…..) .

Le courrier adressé par le conseil en propriété industrielle peut-il être produit devant le juge ?secret conseil en propriété industrielle CPI

  • Une réponse est donnée par l’arrêt du 24 novembre 2015 de la Cour de Paris.

Considérant que cette pièce est un courrier du conseil en propriété industrielle de la société P…… fait en réponse au courrier adressé à ces derniers par l’avocat de la société C……le 18 juin 2012, dont l’intimé demande le retrait en application des dispositions de l’article L. 422-11 du code de propriété intellectuelle en vertu desquelles  » en toute matière et pour tous les services mentionnés à l’article L. 422-1, le conseil en propriété industrielle observe le secret professionnel. Ce secret s’étend aux consultations adressées ou destinées à son client, aux correspondances professionnelles échangées avec son client, un confrère ou un avocat, aux notes d’entretien et, plus généralement, à toutes les pièces du dossier » ;

Considérant qu’il résulte de ces dispositions issues de la loi du 11 février 2004, que le conseil en propriété industrielle est astreint à un secret professionnel absolu et que l’étendue de ses obligations en la matière est similaire à celle des avocats ;

Considérant que le courrier litigieux a été adressé par le conseil en propriété industrielle de la société P….. à l’avocat de la société C….. , de sorte qu’il est couvert par le secret professionnel ; que d’ailleurs il comporte la mention ‘CONFIDENTIEL art. L422-11 CPI’ ; que prétendre que dès lors que l’avocat n’est pas de son côté tenu au secret édicté par cet article, il lui serait loisible de divulguer une correspondance qui lui a été adressée sous couvert de confidentialité, revient à vider de sa finalité ce secret destiné à protéger les intérêts du client concerné ; qu’il convient en conséquence de faire droit à cette demande et, infirmant l’ordonnance de ce chef, d’écarter des débats la pièce n°14 communiquée par la société C….. , dans les conditions fixées au dispositif de la présente décision, sans qu’il y ait lieu de prévoir une astreinte ;

  • Rappelons ce qu’avait dit l’ordonnance infirmée sur ce point.

De fait, s’il est exact que l’article L422 – 11 du Code de la propriété intellectuelle, tel qu’issu de la loi du 11 février 2004, dispose qu’en toute matière « le conseil en propriété industrielle observe le secret professionnel », ce texte, inséré dans le chapitre traitant des « conditions d’exercice de la profession de conseil en propriété industrielle » a pour seul objectif d’obliger les membres de cette profession à garder confidentiels leurs échanges verbaux écrits avec leurs confrères, leurs clients et les avocats, mais non pas à rendre inviolables toutes leurs correspondances, dès lors que le destinataire a souhaité les rendre publiques.

En l’espèce, dès lors que rien n’interdisait à l’avocat d’une partie de communiquer à celle-ci, en vue de sa production en justice, une lettre par lui reçue, il ne sera pas fait droit aux demandes d’exclusion, la seule circonstance que cette lettre émane d’un conseil en propriété industrielle ayant pas pour effet de rendre cette preuve irrecevable.
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